Segmentum Pacificus, Elona, Spatioport Primaris, 999.M41. 01h30.
La soudaine diplomatie et démocratie que tenta d’instaurer Djamena dans l’escouade, n’eut pas l’effet escompté. L’indigène de la planète, la jeune Taille Tallgott prit la parole et s’accapara le rôle de commandement. Anatoli raffermit la prise sur son arme devant une telle insubordination, mais il se calma bien vite lorsque l’élonith dévoila ses intentions et qu’il vit que le caporal Geist allait aussi dans son sens.
Aïcha Djamena était un peu honteuse. Elle n’avait pas voulu faire preuve de faiblesse. Bien que la mort de Madji l’ait clairement affectée, elle avait juste voulu donner à l’escouade les clés de leur destin. Personne ne l’avait visiblement compris, hormis peut-être la seconde classe Tamblyn qui semblait atterrée par les vociférations vindicatives de Taille Tallgott. Quoi qu’il en soit, ils avaient choisis leur destin. Ils allaient affronter cet astartes. Un monstre de muscle et d’adamantium qui pourrait bien les exterminer tous autant qu’ils étaient. Il était vrai que tous ensemble ils pourraient en venir à bout, mais c’était se voiler la face que de croire que cela se ferait sans pleurs et sans larmes.
Aïcha Djamena, rétablit dans son rôle de chef d’escouade après la tirade de Tallgott, entraîna ses hommes au pas de courses dans les couloirs sombres du spatioport. Les cadavres étaient fréquents, mais par chance, il n’y avait nulle tourelle reconditionnée par ici. Les employés de ces bureaux qu’ils traversaient semblaient avoir été massacrés à courte distance par des munitions d’un calibre bien supérieur à leurs propres armes. Surement des bolters, voire pire...
L’escouade 2 ne fut pas simple à trouver car aucun son, aucune fusillade ne semblait émaner du spatioport. Le calme était roi. Bien heureusement Taille avait enregistrée tous le plan du spatioport sur sa tablette de données. Leur course était uniquement rythmée par le bruit de leurs pas et de leur respiration. Ce n’est qu’au détour d’un couloir qu’ils tombèrent nez à nez avec l’escouade de Radja. Dans la panique, tous se visèrent de leurs fusils laser avant d’abaisser leurs armes, conscient qu’ils étaient alliés. Du moins c’est ce qu’essaya de comprendre le caporal Geist. Car l’arrivée en trombe et l’ouverture immédiate du feu par le fameux Astartes le fit paniquer et il ouvrit le feu à son tour sans prendre gare. Vassili en fit les frais. Une décharge laser partit de la bouche du fusil de Geist et heurta violemment la tenue pare-balle du Death Korps de Krieg. Le laser s’enfonça dans ses chairs en grésillant, et dans un hurlement il tomba à la renverse. Un peu secoué par ce qu’il venait de faire, Aestaban regarda les alentours, choqué, voyant tout au ralenti.
L’immense astartes portait une armure d’un gris très sombre aux livrées jaune et noir. Sur son épaulière droite il portait un immense insigne blanc qui représentait un casque de fer. Certains des gardes impériaux présents, parmi les plus érudits, surent de quelle légion de l’Empereur avait autrefois appartenu cet être. Mais c’était du passé. Autrefois un fier et honnête guerrier, vêtu d’une armure d’adamantium immaculée, il était désormais un monstre d’acier sans aucune pitié ni humanité. Son armure avait été reforgée afin qu’elle soit bien plus meurtrières. Des rangées de piques et de crochets métalliques parsemaient son armure afin que les corps à corps deviennent de véritables carnages. C’est d’ailleurs vers ce type de combat qu’il se rua. Le Capitaine Ali Radja semblait être sa cible. En pleine course, l’astarte lâcha une rafale de bolts en direction de Marcus. L’héroïque major qui avait pu permettre la fuite de son escouade au moyen d’une grenade photonique, fut fauché par les munitions explosives du bolter. Les bolts se plantèrent dans ses genoux avant d’exploser. Le pauvre homme se retrouva au sol, sur ses moignons. Le hurlement terrible qu’il poussa n’épargna personne. Empli de colère, son frère d’armes harakoni ouvrit le feu sur le traître en hurlant les pires jurons que pouvaient connaître un militaire. Personne ne le vit, mais derrière la verrière teintée de son casque carapace, Sextus lâcha une larme qui roula longuement sur sa joue. Elle ne put sécher que grâce à la chaleur que dégageait le fusil radiant laser utilisé à son plein potentiel.
Approchant dangereusement d’Ali Radja, le capitaine de l’escouade ne put son salut que grâce à un tir très bien ajusté de Tamblyn dans une jointure au niveau du genou de l’armure du Space Marine. L’Iron Warriors posa un genou au sol, visiblement affecté par ce tir de la jeune femme. Tous, hormis Djamena et Taille, profitèrent de ce moment de répit pour faire feu de toutes leurs armes. L’armure noircie et fuma, l’astartes grogna. Il semblait salement amoché, mais bien décidé à ne pas mourir. Ces gardes avaient attisés sa colère et cette dernière était bien plus forte que tout autre sentiment. Ces vermisseaux du faux-empereur devaient mourir. Dans un acte douloureux et courageux, l’astartes se remis debout en grognant, et d’une main, mis en joue le Capitaine Ali Radja. De l’autre main, l’astartes dégoupilla une grenade qu’il lança en direction dans le tas. Tous se mirent à couvert sauf trois personnes. Le capitaine Ali Radja, paralysés par le monstre d’acier qui se tenaient devant lui et qui le visait de son énorme bolter. Le Major Marcus qui ne pouvait pas bouger et qui perdit définitivement ses membres inférieurs avec l’explosion de la grenade antichar. Et enfin, Aïcha Djamena qui lâcha une énorme salve de son lance plasma. Celle-ci transperça l’armure du Space Marine de part en part. Ce dernier, surpris, baissa son arme, regarda son bas ventre, puis dans un grognement amplifié par son vox, il tomba en arrière.
Tous les soldats plaqués au sol se relevèrent progressivement, plein de poussières, se demandant ce qu’il s’était passé et pourquoi une forte odeur d’ozone planait dans le couloir. Cette réponse était devant eux. Aïcha Djamena se tenait fièrement, son lance plasma encore fumant. Elle décocha un grand sourire ironique à Kaitlyn Galate qui ne put râler, tant l’acte de la lieutenant avait été admirable. Malgré les tirs incessants, rien n’avait pu mettre un terme à la vie de l’astartes. Elle seule y était parvenue. Le Space Marine, gisait au sol, éventrée, ses lentilles optiques éteintes. Seul l’énervant vrombissement du moteur de son armure énergétique témoignait de sa vie passée.
Reprenant leurs émotions, ils se bousculèrent tous au chevet des blessés. Vassili grognait sa colère vis-à-vis du Caporal Geist alors que Borodine lui prodiguait des soins sur son épaule amoché. Sextus était penché sur son supérieur, l’air triste. Marcus était au bord de la mort. Son sang s’écoulait à flot de son tronc qui avait autrefois servi de base pour ses jambes. Il y avait très peu de chances pour que Marcus survive. La blessure était très grave et il serait un lourd fardeau pour la suite s’ils devaient le traîner jusqu’à un lieu plus sûr. Sextus le savait, mais il ne pouvait s’y résoudre. Marcus avait été son supérieur depuis bien des années et il lui avait tout appris. Il ne pouvait l’abandonner là. Qu’aurait-il fait à sa place ? Il n’en savait rien, et le Major était dans l’incapacité de lui répondre, tant il délirait sous les effets de la douleur. Lorenzo, lui, jurait de tous les noms. Il était blanc comme un linge et il n’avait pas encore pris pleinement conscience de la perte de son bras gauche. Qu’est-ce qu’il s’est passé, qu’est-ce qu’il s’est passé, répétait-il sans arrêt à l’intention de Kaitlyn Galate qui faisait de son mieux pour le soigner. Par chance le bras avait été « proprement » arraché, il ne restait pas de résidus métalliques. Le lieutenant s’acharnait à faire stopper l’hémorragie, mais en vain. Chaque nouveau bandage se teintait instantanément de sang. Après plusieurs essais, Galate se résolut à laisser comme ceci pour l’instant. Lorenzo devrait tenir comme ça en attendant des soins meilleurs.
A des centaines de mètres de là, dans un couloir baigné de sang, le cadavre éclaté de Madji attendait bien sagement. Était-il condamné à reposer ici ?
Alors que les soins médicaux atteignaient leurs paroxysmes et que le teint de Radja passait de blanc albâtre à beige clair, une alarme se fit entendre dans tout le bâtiment et des gyrophares rouges se mirent à clignoter intensément. Visiblement le courant n’était pas totalement coupé dans le spatioport. Ou peut-être n’était-il pas à la disposition de tout le monde. Au vu des événements récents il était très probable que l’alarme ait été déclenchée pour eux. Il fallait agir et promptement. Mais comment ? La morale, la mission ou la fuite ?